Sunk

Livre: Sunk, Calvo, Les Moutons électriques, Bibliotheque De, 9782361836306  - Le Biglemoi

Titre : Sunk

Auteurs : Sabrina Calvo et Fabrice Colin

Illustrateur : Arnaud Cremet

Éditeur : Les Moutons électriques

Genre(s) : roman graphique

Nombre de pages : 256

Sunk est un monde qui coule. Un monde de fantasy, hein ? Avec des épées et tout ça. Et aussi des parcmètres. Et des citations de Périclès. En fait, on ne sait pas très bien si c’est l’eau qui monte ou si c’est l’île qui descend mais soyons honnête, ça ne change rien au problème : les habitants paniqués grimpent vers des hauteurs toujours plus étroites et mal fréquentées, et le processus de destruction suit inexorablement son cours…

Inspirée par quelques écrivains français oubliés, parfaitement documentée sur la vie sexuelle des loutres, hantée par les fantômes de Jacques Tati, Marcel Pagnol et Robert E. Howard, cette fable initiatique, tragi-comique et contenant de vraies recettes de pizza inédites, trimballera le lecteur de villes boueuses en révélations fracassantes, avec au cœur une seule devise : si le naufrage est inévitable, détends-toi et reprends donc un picon-bière.

Mon avis

Nouvelle addition à ma collection de la bibliothèque dessinée, Sunk est un ouvrage en bichromie bleu canard-noir, choix de nuance de bleu qui prend tout son sens à la lecture ! Un nouvel ouvrage atypique dans sa forme, mais aussi dans son fond.

L’eau monte… à moins que ce ne soit l’île qui descende ? Le résultat est cependant le même : les habitants doivent fuir vers le sommet pour échapper aux flots ravageurs et à leurs résidents carnivores. On suit Sébastien et Arnaud, deux frères qui ont toujours vécu dans la pauvreté d’un petit village de Sunk, passant leur journée à rêvasser, boire des picon-bières ou se disputer. Sébastien est le plus gentil des deux. Naïf, rêveur, altruiste, il est bon avec tout le monde, mais son frère le considère comme le simplet de service qu’il doit sauver malgré lui. Arnaud est quant à lui méchant et méprisant avec chaque personne qu’il croise. Il n’a de respect pour personne à part lui-même et se considère comme l’élu qui sauvera le monde.

Leur quête commence lorsque l’eau arrive à leur village. Il rejoignent une équipe de bras cassés afin d’aller chercher de l’aide au-delà de la Grande Barrière. Commence un voyage incroyable, fait de rencontres improbables, d’aventures loufoques, d’absurdes surprises, bref, d’un joyeux bordel , dans lequel l’eau n’a de cesse de grimper. Les morts s’accumulent… mais parfois ils ne sont pas morts ! C’est un récit farfelu, abracadabrantesque, parfois vulgaire et sale, d’une grande violence, philosophique et WTF à la fois. Il ne faut s’attendre à rien, car tout peut arriver. Il faut d’ailleurs parfois s’accrocher pour suivre et certains éléments m’ont tout simplement échappé.

Il faut mieux ne pas trop s’attacher aux personnages que l’on croise. Bien qu’on ne sache pas ce qui arrive à chacun, on se doute du destin funeste qui attend ceux qui ne continue pas l’ascension de l’île. La galerie de personnages présentée par les auteurs est fascinante : on passe de la vieille mémé qui vend son ragout de fiente à une petite taupe toute mignonne, d’une mystérieuse armure à des champigolos , d’un maire canin à une clé du mystère, d’un dieu Canard et ses fidèles à une serveuse aguichante…sans oublier l’énigmatique maitre du Sémaphore. L’artiste s’en donne à cœur joie pour illustrer cette ribambelle éclectique !

Le style d’écriture est en tous points en accord avec le récit : il se veut parfois poétique, parfois vulgaire, souvent absurde, mais toujours juste. Ce roman a été rédigé à 4 mains et je me demande vraiment comment les auteurs y ont travaillés ensemble pour obtenir ce résultat hors normes. Les chapitres alternent entre le point de vue de Sébastien et d’Arnaud et donnent une vision bien différente de la réalité qu’on est en train de vivre en fonction de la perspective.

La mise en page de ce roman est tout aussi incroyable que son contenu : la couleur bleu fait ressortir cette omniprésence de l’eau. Où qu’on regarde on la sent sur le point de déborder, elle nous presse à tourner les pages pour ne pas à notre tour nous retrouver noyé et dévoré par les voraces requins. Les textes et les dessins s’entre-mêlent et forment un tout visuellement très réussi.

Citations

« Vous pouvez croire en Dieu, vous pouvez croire aux étoiles, au destin, à l’océan primordial, à tout ce que vous voudrez, mais sachez ceci, pénétrez-vous de cette certitude : quand l’air vient à manquer, quand vous donnez des coups de talons pour remonter à la surface et que le salut vous est impitoyablement refusé, il n’y a plus d’amour, plus de lumière, toutes les directions sont perdues, écrasées, rongées par le sel, votre âme polie par l’oubli, votre esprit disséqué, éparpillé aux quatre vents, les goélands vous accablent d’injures stridentes et dès cet instant vous êtes prêt à tout, juste pour une seconde d’oxygène, n’oubliez pas : la Pizza doit cuire tout en restant moelleuse et croustillante, c’est le secret ultime, moi je descends au four. »

Conclusion

Un roman court illustré surréaliste : deux frères diamétralement opposés entreprennent ensemble un voyage incroyable vers le sommet de l’île, alors que l’eau continue inexorablement de monter (ou l’île de descendre). Une mise en page qui allie superbement textes et illustrations originales, dans les tons noir et bleu canard. Encore une belle réussite pour la Bibliothèque Dessinée !

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ovni

#FungiLumini

Une réflexion sur “Sunk

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