La Morsure des roses

Titre : La morsure des roses

Auteur : Christophe Guillemain

Illustrateur : Cyrielle Foucher

Éditeur : Mnémos

Genre(s) : fantasy mythologique

Nombre de pages : 288

Caelynn, la plus jeune fille du dieu Ur-Orio, a passé son enfance sur le mont Eremion avec ses quatre sœurs, isolée du reste de la civilisation. Lorsque ses deux aînées assassinent brutalement leur précepteur, Caelynn s’enfuit avec Riveline, la plus vulnérable des cinq. Ensemble, elles tentent de trouver leur place dans ce nouveau monde, mais leurs aspirations divergent et leurs chemins se séparent. Des années plus tard, apprenant que sa sœur, devenue reine, est sur le point d’accoucher, Caelynn décide de la rejoindre pour la mettre en garde face à la menace de leurs aînées immortelles, prêtes à tout pour empêcher l’enfant de naître.

Alors que les préparatifs des célébrations à la gloire de l’héritier battent leur plein, Caelynn doit définir son rôle dans la tragédie à venir, entre intrigues, complots et sombres vengeances. Car dans l’ombre gigantesque de leur divin père, il ne reste aux cinq filles illégitimes d’Ur-Orio, enfin réunies, qu’une seule voie possible : s’affranchir du passé… ou périr.

Mon avis

J’avais adoré le premier roman de l’auteur, L’enterrement des étoiles, à la fois pour sa plume soignée et pour son univers dense et atypique. J’ai retrouvé tout cela et bien plus encore dans ce second roman, entre tragédie mythologique et folie surréaliste. La magnifique couverture pleine de ronces et de masques donne le ton de ce récit théâtral.

Caelynn essaie de rejoindre sa sœur Riveline, devenue reine et sur le point de devenir mère. Elles sont les filles mortelles du dieu Ur-Orio, jalousées par leurs autres sœurs immortelles. Caelynn veut à tout prix protéger Riveline et son enfant à naitre, mais celle-ci se méfie de tout le monde, même, voire surtout, de son propre sang.

Presque toute l’intrigue se déroule dans le palais. Ce n’est cependant pas un endroit ordinaire: tout y est luxe, grandiloquence et extravagance, en totale opposition avec la population qui meure de faim dans tout le royaume. La folie et la décadence sont monnaie courante à la cour. Caelynn se fait d’ailleurs d’abord enrôler dans un jeu d’échec géant dans lequel toutes les pièces sont des êtres humains, emprisonnés sur leur case jusqu’à ce que le roi et la reine continuent leur partie géante. Le palais est un labyrinthe duquel les couloirs sont tous piégés: tout y est beau, mais un pas de travers peut entrainer la mort.

La noblesse est obnubilée par la naissance à venir, ainsi que par le désintérêt, voire la folie, qui touche le roi. Tout est démesure et complots, secrets et trahisons dans ce petit monde régi par quelques grands esprits. Les magnifiques cadeaux de naissance, les fêtes somptueuses et les constructions gargantuesques ne parviennent pas à cacher le vice qui pourrit cette cour. Les masques tombent petit à petit pour révéler la véritable nature des personnages, et ce qui se cache n’est pas toujours beau à voir.

Caelynn est un personnage d’une force morale presque aussi grande que sa naïveté face au monde qui l’entoure. On s’attache tout de suite à elle, la battante qui ne baisse jamais les bras une fois son objectif fixé, malgré les revers du destin, les découvertes macabres et les trahisons. Elle est touchante dans sa volonté de sauver sa famille actuelle, mais aussi dans celle de venger celle qu’elle aurait pu avoir. En plongeant tête baissée pour sauver son futur neveu, elle va découvrir des secrets de famille qu’elle aurait peut-être préféré laisser enfouis.

Riveline est aussi un magnifique personnage, mais plus difficile à cerner. Elle s’est placée à un endroit où elle espérait être protégée, mais tous ses murs s’écroulent, la laissant plus vulnérable que jamais face à ses sœurs. Elle se défend cependant toutes griffes dehors pour sauver le petit être qui grandit en elle. Les autres sœurs sont fascinantes chacune à leur façon : Llybia , la géante, Eluria, la Mère des fous et Nifère, la nécromancienne.

Certains chapitres sont des réminiscences de l’enfance des jeunes femmes, leurs vies solitaires sur le mont Eremion, leur relation avec leur précepteur, mais surtout avec leur père… Des moments clés qui ont déterminé leur personnalité sont dévoilés au fil des pages, et nous permettent de mieux appréhender les enjeux de la naissance à venir pour toutes les protagonistes. Je dois dire que j’ai trouvé le final, subtil mélange entre le courage désespéré des sœurs mortelles et les pouvoirs effrayants des deux immortelles folie et mort, tout à fait délicieux!

Citations

« Toi, dont je reconnais les yeux et le sang, je ne reconnais de toi que cela: les yeux et le sang. S’il y avait encore de la force dans tes bras et du courage dans ton cœur, tu n’aurais pas de valets, mais de solides montures, tu habiterais une forteresse sise sur un pic au lieu d’un palais de marbre, et à la place de ces beaux atours, tu porterais l’armure et l’épée de tes ancêtres. Ne te laisse pas aveugler par l’or et l’apparat, car ils sont autant de défauts dans ta cuirasse. Ces fatuités sont les blessures par lesquelles s’écoule la véritable essence de notre famille. Prends garde ! Lorsque le corps de notre famille sera tari de son sang, il se desséchera, tombera en morceaux et finira là où les vers font leur festin. N’attends pas ! Il n’est pas trop tard pour agir, car la guerre gronde, elle fait entendre son bruit comme le carillon de l’arène où se jouent les destins… »

« On pense tous être libres, on voudrait l’être, mais ce n’est qu’un instinct. Nous sommes tous les esclaves de notre passé. »

« La mort n’a pas de visage, seulement un masque. sa voix ressemble à un écho, celui que l’on entend en jurant de n’avoir pas appelé. »

Conclusion

Vous l’aurez compris, j’ai adoré à la fois l’ambiance incroyable, entre folie pure et sombres complots, et les personnages super attachants de ce roman. Une tragédie très noire, mais aussi colorée par cette extravagance et ce surréalisme qui teintent le récit. Une nouvelle réussite pour cet auteur qui mêle avec brio mythologie familiale, horreur et étrangeté. Une excellente découverte !

extra1

#FungiLumini

Une réflexion sur “La Morsure des roses

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