Monstresse(s)

Titre : Monstresse(s)

Auteurs : Xavier Lhomme, Maxence Madone, Sarah Kügel, Dola Rosselet, Gillian Brousse, Népenth S.,Émilie Chevallier, Charlène Ferlay, Éli Boudeau, Maëlig Duval, Kathrine Hasnaoui, Morgane Stankiewiez.

Illustratrice : Emilie Léger

Éditeur : Noir d’Absinthe

Genre(s) : recueil de nouvelles horreur

Nombre de pages : 232

Lovée au creux du sein maternel, son cruel poison s’insinue dans le lait intime, corrompt et pervertit jusqu’au socle même de la société. C’est la dévoreuse, la puissance féminine de l’ombre, crainte et pourchassée à égale mesure. Qui se cache derrière ces traits tantôt hideux, tantôt radieux ? Descendez aux côtés de nos auteurs dans les catacombes de la civilisation, explorez cette peur du féminin, excavez les tabous qui l’habillent, parure de chair et de sang, ornement de stupre et de vengeance…

Mon avis

Je remercie Babelio et Noir d’Absinthe pour ce livre! Je suis dans un mood où j’ai envie de lire des nouvelles, et ce recueil me faisait de l’œil depuis un petit temps déjà ! Je ne connaissais presqu’aucun.e des auteur.e.s de ce recueil, ce qui m’intriguait encore plus : j’adore découvrir de nouvelles plumes. Saluons aussi également la magnifique couverture ! Ce livre a été dans son ensemble une excellente lecture, avec des nouvelles variées et originales, qui reprenaient les thématiques liées à la femme et au monstre.

Gésines – Xavier Lhomme

L’histoire d’une femme qui chérit la grossesse. On comprend vite qu’elle a eu et veut encore de nombreux enfants. Une nouvelle à la première personne partagée entre les sensations de l’évolution de la grossesse et le quotidien, les états d’âme nostalgiques de la protagoniste, jusqu’à la délivrance finale.

« Je tombe enceinte comme on tombe dans la drogue. »

Adeline Mollette – Maxence Madone

Une très courte nouvelle, mais efficace. On ne s’attaque pas sans conséquence à l’outil de travail d’Adeline !

« A défaut de justice, il reste toujours la vengeance. »

Mosquita Muerta – Sarah Kügel

Une nouvelle à double narration : une du point de vue extérieur, plusieurs personnages se partagent le privilège, et l’autre décrite dans le journal de la protagoniste. Un texte à l’ambiance tendue et crissante, comme le sable de la tempête qui s’immisce dans l’hôtel. Un huis-clos imprégné de noirceur et d’anciennes croyances mexicaines.

« Je jeûne, mais mon âme est avide d’une autre nourriture, plus spirituelle. Je fais des rêves étranges de lumineux de jardins, de fleurs et de chair d’hommes, ou peut-être sont-ce des hallucinations? »

Enracinée – Dola Rosselet

Une jeune fille ne souhaite pas quitter la demeure délabrée, héritage familiale. Elle va donc tout faire pour rester. La nouvelle que j’ai préférée, à l’ambiance sombre et végétale, rythmée par des phrases qui agissent comme des incantations.

« Chaque nuit, rêver de toi. Sentir ma chair se languir de nos étreintes. Trouver sur mes lèvres un goût de sang et d’humus. Patienter. »

La complainte de Saddie Burnell – Gillian Brousse

La plus courte nouvelle du recueil. Une jeune fille vient se venger de l’homme qui a ruiné sa vie… mais est-elle si innocente?

« La princesse incomprise, que l’on traite de bourreau, leur offrit alors, d’un geste assuré, le plus beau des cadeaux. »

Les griffes en dehors – Népenth S

Une nouvelle toute en ambivalence. La protagoniste a des griffes qui poussent de plus en plus et dont elle ne sait que faire. Celles-ci sont à la fois littérale et métaphorique. Elles représentent les états d’âme de cette fille qui a du mal à se faire sa place en société et dans sa famille, mais qui garde tout de même un garçon enfermé chez elle qu’elle torture. J’ai eu du mal à me figurer le monde dans lequel on évoluait, certaines choses se rattachant au monde qu’on connait, d’autres pas du tout, mais cela n’a cependant pas entravé ma lecture.

« Quand on a en nous quelque chose d’enfoui, on se met à creuser, on est curieux, on veut savoir. Et quand on finit par déterrer ce qu’on cherchait, parfois, on ne sait pas quoi en faire; et surtout, on se rappelle pourquoi on l’avait enfoui si profondément. »

Une affaire de famille – Emilie Chevallier

Uma vit la mort de sa mère comme une délivrance. A la lecture du testament, elle déchante cependant : celle-ci souhaite vivre à nouveau, en cohabitant dans le corps de sa fille avec celle-ci via un artefact implanté dans sa tête. Uma n’a d’autre choix que d’accepter ce qui se révélera être un enfer. Lorsque sa mère lui propose un autre marché, encore plus immoral, Uma ne sait que faire… Une nouvelle de SF qui pose des réflexions intéressantes sur la maternité !

« A la fin du processus, votre mère – ou plutôt son âme – aura un accès total à vos pensées, vos sensations, vos sentiments… Et vous aurez le même accès à son esprit. »

Violin Mantis – Charlène Ferlay

L’histoire de la rencontre entre deux musiciens, étrange relation qui se transformera en amour et plus si affinités.

« Elle se disait artiste, et tout son être tournait autour de cela. »

Paradis Perdus – Eli Boudeau

Un texte sur la vengeance et l’apaisement qu’elle peut apporter !

« De nombreux auteurs disaient que les paradis étaient faits pour être perdus – peut-être que le mien n’a pas sa place ici. Peut-être que je dois renoncer, alors. Je doute de mon Eden, et je suis vulnérable, ici. »

Oh lala, Lola! – Maëlig Duval

Cette nouvelle est, pour moi, la plus originale du recueil, je ne m’attendais pas du tout à ça ! On suit Lola, en surpoids, qui doit prendre le métro, avec tous les obstacles et les situations malaisantes que cela implique. Comme cette femme qui lui demande de combien de mois elle est enceinte… Je n’en dis pas plus pour ne pas spoiler, mais la tournure que la nouvelle prend est totalement improbable et inattendue!

« L’âme ne serait alors qu’une peau nue, encore plus nue que la peau nue, et davantage exposée? »

La monstration – Kathrine Hasnaoui

On se trouve dans une société dystopique, plus précisément dans un camp d’entrainement de garçons. Les femmes ont été asservies et servent uniquement à la reproduction. Ce camp entraine les futurs hommes à détester les femmes, à les trouver repoussantes. Mais voilà, Dré n’est pas comme les autres…et il risque de le payer cher.

« Chers jeunes, voilà quelques mois que nous vous formons dans notre centre. Vous avez développé vos muscles et votre puissance, votre coffre, votre connaissance de la juste doctrine. Les fondements sont en place. A présent, vous êtes prêts pour comprendre ce que rejette notre société en chair et en os, vous êtes prêts pour affronter la femme. « 

Incouchement – Morgane Stankiewiez

Une nouvelle plutôt malaisante de par ses thèmes : un couple visite une clinique spécialisée pour implanter un nouvel utérus à la femme. On sent cependant clairement qu’elle subit cette opération plutôt que de la choisir, et son corps se rebelle inconsciemment contre cet état de fait.

« Je ne comprends pas. J’ai toujours eu un appétit de moineau, et voilà qu’après un diner plus que copieux, la faim me ronge comme si je n’avais rien mangé depuis le matin. »

Conclusion

Des nouvelles dans différents genres de l’imaginaire qui comportent toutes une part d’horreur et une part de féminité. Un recueil qui décrit avec richesse et noirceur la part monstrueuse qui se cache au plus profond de nous. Des textes qui osent la différence et l’originalité dans des thématiques pourtant déjà souvent abordées. Une très bonne lecture que je recommande!

extra1
public averti horreur

#FungiLumini

Une réflexion sur “Monstresse(s)

  1. Bonjour et merci pour cette chronique ! Effectivement, le monde dans lequel évolue Amandine, la narratrice, est un univers absurde qui emprunte à la fois à notre monde et à un monde imaginaire où toute métaphore devient littérale. A bientôt dans un autre article ^^ Népenth S.

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